Le souvenir du Sphinx

Comme un symbole, Robert Herbin s’est éteint alors que l’ensemble de ses contemporains était probablement dans les bras de Morphée, confiné par la faute d’un virus destructeur. Sa disparition en pleine phase ascendante du Covid-19 n’aura pas empêché la tristesse, mais la crise sanitaire aura au moins permis à ce solitaire de s’en aller tranquillement, à 81 ans, après une vie bien remplie et après en avoir rempli lui-même des millions d’autres.

Robert Herbin était un regard. Un regard perçant, déjà. Mais aussi un regard sur le football. Inspiré par l’Ajax Amsterdam, il apporte un souffle nouveau à travers l’ASSE, son club de toujours, dont il porte le maillot Vert en 1957 et 1972. Milieu défensif, volontaire et doué, il est international de par ses qualités de joueurs, mais prend une toute autre dimension lorsqu’il devient entraîneur.

À 33 ans, les crampons à peine raccrochés, il guide ainsi vers les sommets une bande de jeunes qui vient de remporter la Coupe Gambardella. Champion en tant que joueur, il le devient aussi en tant qu’entraîneur. Arrivé dans le Forez en 1957, dans la foulée du premier titre dans l’histoire du club, il contribuera à la conquête de tous les trophées qui suivront. Joueur reconverti coach il est les deux en même temps en 1975 : son équipe déjà assurée d’être sacrée, il entre en jeu lors du dernier match face à Troyes et inscrit un but sur penalty. L’histoire ne dit pas si le Sphinx osa demander à Roger Rocher de lui verser deux fois la prime de champion.

Son talent de manager se traduit aussi dans les différents parcours européens des Verts de l’époque. Exploits retentissants, remontées incroyables, scénarii improbables : les matches du milieu de semaine dessinent un refus inné de la défaite. Parfois concassés loin de leurs bases, les Stéphanois gardent toujours un atout dans leur manche, celui de jouer le retour dans le Chaudron. Le travail vidéo sur les adversaires et la préparation athlétique minutieuses, deux aspects novateurs dans le football français de l’époque, font du club un stéphanois un précurseur dans son domaine.

Son legs fut inestimable et son savoir l’atout majeur de l’ASSE, dont l’empreinte née lors de l’époque de Robert Herbin se ressent encore aujourd’hui. L’année 2020, difficile jusqu’au bout, porte aussi son souvenir pour l’éternité.

Et naquit le Centre sportif Robert-Herbin

Attaché à l’esprit fédérateur des jeunes pousses d’un club, Robert Herbin n’hésita pas à faire confiance aux pépites du centre de formation lorsqu’il prit en main l’équipe première du club. C’est donc naturellement que le Centre sportif Robert-Herbin naquit suite à la disparition du Sphinx. Avec, au cœur du domaine, les terrains Georges Bereta et Aimé Jacquet, deux autres ambassadeurs à vie du club.